Spinoza encule Hegel (Jean-Bernard Pouy)
Spinoza encule Hegel, de Jean-Bernard Pouy, est un roman jubilatoire, picaresque, dans un univers à la Mad Max situé entre Ivry et Marseille. J’ai adoré.

Résumé
«Moi,Julius,Commandeur du groupe crash le plus honnipar le peuple saumâtre des hégéliens,n’ai que des ennemis.Et mon pire ennemi,je lui souhaite la pire des choses.Moral car prévisible.Quand il sera au bout de mon P. 38,j’appuierai sur la détente.Mes bottes de lézard mauvevont tremper dans du sang esthétique.Normal car spinoziste.»
Une France en grève générale permanente, où l’état est aux abonnés absents, est devenue le terrain de jeu de gangs hyper-violents qui s’étripes joyeusement au nom de préceptes philosophico-politiques réduits à l’état de cris de guerre ou d’étendards vidés de leurs sens.
Bien sur, toutes ces belles idées ne sont que des prétextes, pour ces mâles plein de testostérone, à s’inventer une vie, vainement héroïque, peuplée de chevauchée sur grosses cylindrée et de fusillades avec gros calibres.
Mon avis
J’ai adoré. Spinoza encule Hegel est une grande bouffée de liberté, trépidante, détonante, menée à cent à l’heure.
On me promettait un “roman court, 100% rock’n roll, totalement réjouissant” et c’est exactement ce que j’ai eu. Avec, en prime, cette plume jubilatoire, tellement alerte, drôle, brillante, intelligente et trempée dans l’acide, tout ce que j’aime.
Spinoza encule Hegel est une fable dont on ne doit pourtant pas sous-estimer la profondeur. Roman noir décalé, il est truffé de références subtiles, qui t’amuseront si tu les repères et ne te manqueront pas si elles t’échappent.
Spinoza encule Hegel, c’est un cri de guerre, mais c’est aussi la soif de victoire des réalistes sur les idéalistes. Ecrit en 1979, avant la sortie de Mad Max (ceci pour souligner que la référence à l’univers de ce film est anachronique et uniquement destinée à te représenter l’univers du livre), il décrit, d’une certaine façon, la France post-soixante-huitarde, choisissant une fin qui a pu dérouter certains, mais témoigne, à mon sens, d’une certaine vision de l’auteur sur l’évolution de la société.
Morceaux choisis
Le suprématiste vente de liberté qui nous arrose la tête n’est pas le fruit d’une longue lutte, comme le diraient les (Trots) Kystes mais le résultat logique et mordoré d’une accumulation primitive de faits, de petits faits, de petits événements paradoxaux, eux-mêmes produits par un grand merdier.
“Ca y est, les troskos se bourrent la gueule, ai-je pensé. Il y a des réalités qui restent éternelle, ils ne comprendront décidément jamais rien à la poésie”
– Obligé, obligé, rétorquai-je en sortant mon P.38 et en tirant sur Carman qui fut cloué à son fauteuil de surprise et de mort violente.